jeudi 29 décembre 2016

Enchantement, fétiche

Le travail est tel (préparations des débats, sur la base de nombreux documents, hétéroclites, déposés sur le serveur de la coordination des conseils, habitude immédiatement mise en place de réunion de décorticage préalable et rédaction d'une lettre de question à l'adresse de la présidence), et par ailleurs mes propres conditions d'entrée ralentissant mon implication complète jusqu'à la fin de ce semestre, que les lignes de lutte apparaissent et disparaissent.

Je me laisse prendre aux enchantements qui se présentent, y compris celui qui est "de liste", l'énergie qui vient d'un projet, d'une projection communs, le plaisir de réfléchir et analyser et décider sur points et positionnements avec des compagnons - très rare expérience - qui sont aussi des collègues de diverses disciplines et de fonctions diverses, BIATSS. Très rare expérience, et appréciée pour tout l'apprentissage, d'objets et de pratiques, dont syndicales et diversement militantes. La croyance, comme ciment multiplicateur de l'activation. Et pour moi il me semble, la récompense de l'apprentissage, individuation multipliée.

Pratiques de l'opposition : cette mise en place précoce, puisque le diagnostic est composé depuis la campagne, et sans doute la pratique a-t-elle été prévue et désirée au mandat précédent où EL était seul au conseil. Ce savoir hérité et transmis.

Réflexes de l'opposition, aussi. L'opposition obligatoire.
L'erreur, la routinisation, se fait par un effort délibéré d'anticipation, d'attente, des signes reconnaissables de la perspective dominante qu'on sait active. On en attend les manifestations, les expressions, au gré des questions présentées et dans le calendrier des décisions à prendre. Le thème
en ce début de mandat est encore beaucoup à l'urgence dans des conditions d'opacité, parti pris de
prolongement des pratiques antérieures et des choix faits. Une paranoïa de position. On parle, on prend un mauvais plaisir à imaginer, et si et si ?, des stratégies pliées dans les propositions et propos, implicites, coups complexes à deux, trois déclencheurs d'avance, et on fait par là un personnage du pouvoir, tout-sachant, et machiavélien.
On le projette en effet, ici, comme motivé par le pur pouvoir. Ce que la majorité retourne en miroir à la minorité, inquiétante par son jeu de pouvoir. Est-ce que c'est par son obstination à politiser les thèmes et les projets en cours ? La domination de présentant comme la responsabilité et le travail, la construction et le collectif. De manière souvent convaincante, et c'est son enchantement.

Un souffle épique, la fabrique de récits.
Par exemple séance de décembre : devant voter le budget initial pour 2017, elle est ouverte par un "appel à la solidarité", qui est entendu sans attendre par les arcs opposants de la Grande Table d'un même écho (comme cet accord est perceptible physiquement, même sans regards précis), comme catégorie intruse (confusion des espaces. La solidarité appartient donc auquel exactement ? Ici une moralisation, clairement) et interpellation à la dépolitisation.
La décision de l'opposition, qui demande pour la première fois une interruption de séance - jubilation particulière ici, d'entente et dans la critique, de stratégir commun, réflexion sur les modes et degrés d'opposition disponibles. Nous y sommes tous en une jubilation particulière, un peu rentrée (elle serait embarrassante) mais perceptible (le plaisir de se compter ?), et très certainement sensible aux réunis quand nous retournons en mouvement collectif autour de la table - décision donc : ne pas créer de blocage, abstention, geste sémantique. Comment signifier autour d'une table de conseil. Ce sera pendant 4 ans, cette configuration de discours, cette scène.

Des idéologèmes, qui commencent à se discerner à mon oreille. La "volonté politique forte", et l'argument du "tous ensemble", et "toujours collectivement". Repères des impensés. (Non qu'il y ait à décider un pensé total, surveillé.) Impensés : inscription du naturel (alors le régime de la morale) dans le discours.

** Par ailleurs laisser le discours couler et heurter sans fétichiser la critique. Cette pratique, cette attention, sans doute la plus finement critique, l'oreille sur le rail, les flux étant plus souples et plus sinueux qu'on ne s'y attend jamais. Attendre l'inattendu, qui est l'histoire la plus ordinaire.


vendredi 28 octobre 2016

Politique du savoir - communauté scientifique

Qu'une université n'est ni une république, ni une entreprise - son CA, quoi que veuille la culture actuelle faisant pression par le cadre-ideologème de la gouvernance, et malgré les règles du jeu en effet pipées par l'équilibrage des membres extérieurs, a et doit avoir pour principe la collégialité.
Et c'est bien elle, forme même de l'academic freedom, qu'il s'agit d'assourdir, dévier, diluer.
Bien cette lutte-là.

Ce qui est étonnant est la forme que prend cette lutte sur le terrain, entre participants du collégial. Les "rapports de force" qui sont en jeu très explicitement comme pomme actuelle d'opposition, sont la projection en interne de cet effet de la politique de la tutelle - composé de toutes les pressions qu'on connaît. L'un de ses thèmes dans les frictions actuelles : une identification de l'opposition comme corporatisme enseignant, pris en défaut sur son ignorance (open to discussion this) des participants étudiants et administratifs. Avec la certitude de devoir à une politique d'ouverture (et ... revoir le détail dans le soleil termes de la campagne) la montée en majorité par les alliances des représentants étudiants et administratifs, rendant possibles par entraînement celle multipliée par les élections des membres extérieurs.
C'est interpréter le collégial comme un corporatisme, et la spécificité du travail de savoir - qualité propre à l'université, comme corps à gouverner - comme indifférencié parmi les organisations, les associations, à gérer.
La question est celle, 'dans les tréfonds de la notion de valeur' (cf Saussure), de la conception du collectif - projet collectif, et collectif généré par un projet, il y a ces deux forces de formation - qui est en jeu. Qu'on met en jeu. Dont on fait une politique, du savoir. Spécificités des socialités, intersubjectivités, transsujets, du savoir. Compter avec l'utopie, présente et historique dans toutes ses variétés. Mais compter aussi avec ses censures et ses exclusions, internes et auto-produites en particulier.
(JPA me rappelle hier soir la Sorbonne des 1960s, et son retour d'écoute sur mes récits d'activités et collaborations internationales et interdisciplinaires souligne l'ouverture, en contraste. Bon de reprendre cette mesure. L'étonnement et la tâche à venir sont dans la compréhension de
ce qui arrive à passer malgré les blocages de toutes sortes. Peu, fluet, en rien co-extensif avec les formes institutionnelles, et pourtant passant, filets de vie et de transsujet et d'histoire.)

Politique du savoir : quelle pensée du politique par le travail de savoir. Dans la dimension de l'histoire.

mercredi 19 octobre 2016

Communion

Voilà le terme qui était juste un pas plus loin, et que je cherchais sans le savoir : communauté comme communion.
Communion, et politique.
Encore ici ChS qui me fournit le mot.

Participer

Parmi les moves que je vois se faire, un est inattendu, nouveau dans mon champ d'attente, mais lisible. Il vient comme miroir des protestations d'exclusion par le groupe minorisé à l'étape précédente : la minorité invitée à participer, à avoir envie de se joindre, à entrer dans le 'inclusif', le 'ouverture', le 'démocratique' (ici en retrait, non revendication coup de poing).
Le speech-act ici : la minorité s'est clivée du commun, le clivage est de son fait. Renvoyer la responsabilité à.
Et : "ceux qui voudront" : est une individualisation, une prise de la minorité et de l'opposition par sa fragmentation en choix individuels, de nature éthique aussi, ou par conséquent. Morale de la participation. Participation donc comme Bien commun, Bien du commun. Communauté imaginée ici : consensus, humaniste au sens éthique et disciplinaire ou épistémologique.
Vue qui pourrait presque tenir si elle s'accompagnait d'un projet largement mobilisateur dans un mouvement de luttes, ici en direction de la politique des savoirs qui s'impose aux universités, et qui promet de venir peser agressivement après les présidentielles du printemps.

Démocratie

Disons qu'il y aura pour moi deux termes actuellement actifs qui me permettront de reconnaître les deux plans sur lesquels placer l'attention critique, pour le travail à venir : politique, et majoritaire. Mince, il faut je reprenne le fil des les notes d'hier pour retrouve le cœur exact de ce 2eme, qui m'échappe.
J'aurai très largement l'occasion de cerner plus exactement ce pôle 'majoritaire' je pense : je m'attends à ce que ce soit la nature du travail des années à venir.

Ces deux positions de discours ont toutes les deux avancé des déclarations, des identifications, par la démocratie. C'est bien l'interface d'enjeux. 

Consensus

Journée passionnante en apprentissages hier, audition des candidatures à la presidence de l'université, vote consultatif des trois conseils (nouvelles appellations, cartographies Fioraso : CAC et CA), puis vote du CA, incluant auditions des - ici du - candidat/s à la vice-présidence du CA.
Puis dans la foulée socialisation à champagne au patio de la présidence.
Étonnements dans toutes les dimensions, analyses pénétrantes et démonstrations de lissage, physique complexe - avant arrière circulatoire - de l'affrontement.
Beaucoup de matière, à filer comme il sera possible.
Les faire. Les mobilités des positionnements, de chacun. Échiquier constant, chorégraphie. Génération d'effets de collectif, y compris dans les consultations un peu fiévreuses des groupes de clivage.

La candidature vaincue, demoted en minoritaire donc par la machine de pouvoir embrayée sur des résultats électoraux qui laissaient d'autres options possibles, propose une analyse d'ensemble et une réflexion sur la démocratie en milieu institutionnel et public mais non civique, forte et généreuse. Généreuse par largeur de l'ananalyse. Intéressante la difficulté à tenir ce point de vue, l'effort intellectuel qui reste à tenir, devant le déroulement du discours adverse, infiniment plausible puisqu'il est le Vraisemblable même. Condition de la majorité.
Comment un discours (majeur ici) produit, roule devant lui, même lorsqu'on le sent proposé avec toute la bonne volonté sincère du monde, un effet de consensus. Des réassurances de consensus. Peut-être c'est son attrait réconfortant qui résulte dans les adhésions. Douces, et donnant une illusion - càd politiquement un fait : car par de faux en politique, je l'ai appris en décortiquant Taguieff - de corps, d'âme même, de collectif de rêve. Sa douceur répond donc aussi aux meurtrissures des travailleurs universitaires toutes condition confondues (mais alors les voix des extérieurs, et leur poids déterminant dans la construction du majoritaire dans le régime actuel justement - à poursuivre) : tous cherchent des anodynes, pour croire à l'université et à l'existence et à la qualité institutionnelle, sociale, professionnelle, de l'université.
Âme : on entend SHS, Humanités, bons sentiments comme politique universitaire, et comme proposition d'interpellation interne. 

mardi 20 septembre 2016

Acte de majorité

Que la en-majorité investisse toute cette puissance pour assurer sa majorité, est dans la logique des choses, si :
. la majorité ne lui est pas constitutive : la collégialité enseignante s'est divisée à parts à peu près égales, et le risque est celui d'une légitimité fragile. C'est de guerre, de bonne guerre peut-être, conditions des décisions par vote.
. elle craint la fragilité de sa légitimité. Faire le choix de consolider, bétonner, aussi uniment - mais alors aussi visiblement, se dénonçant elle-même publiquement - en assurant auprès d'elle les votes des blocs étudiants, BIATSS et extérieurs, est un choix, et une déclaration. Une priorité à la majorité, clairement énoncée, et performée avec la félicité maximale.

Question pendante pour moi : que craint-elle, de la liste d'opposition ? Outre de n'avoir pas la majorité absolue de fonctionnement, qui est toujours un horizon technique et asymptotique qu'on surveille.
Il va falloir que j'aille identifier ça en remontant dans la conversation, archive du printemps. 

lundi 19 septembre 2016

Minorité et analyse

A. Pour moi l'expérience de la minorité est le plus souvent traitée, la tension dans le corps résorbée et transformée, par la dépense en sémantisation : en analyse.
Il y aura très certainement à observer le rapport entre minorité et critique, avant tout. Et donc les modes de la critique, et des défenses contre la critique.
La minorité est structurellement critique, en position critique. Sans doute ensuite elle a plus ou moins de ressources, en conditions sociologiques si on veut poursuivre dans ce cadre, pour activer la force critique.

Modes de la critique, ou de l'analyse : contextualisation, pour commencer. Lecture des coups par réinscription dans différents ordres de sens. Rapporter à ; faire les rapports. Eventuellement : les réintroduire, éventuellement de force, dans l'espace du débat.

Actes de minorité : se parler, parler out

Sur le champ, constitution d'ensembles de communication : WhatsApp, liste de n° de sms, réunion appelée, pour rédaction de texte, communiqué. 
Ceci en sus de la masse d'ores et déjà conséquente des textes publiés sur le site web de la liste, et en sus de l'adresse du candidat de liste à la présidence de l'université, prochaine tribune programmée. Question de savoir comment et à quoi l'utiliser.

Calculs

Je suis frappée, sur le coup, de l'intensité de la préparation : ces textes sont lus, la bataille est rangée, les calculs les plus avancés ont été faits, et je les découvre au moment où leur réalisation se déroule sous nos yeux. MM, seule à parler de la parole, et à travers la bienséance dénégatrice de double registre, a clairement fait elle aussi, est une de celles qui a fait, les calculs attentifs : quel candidat pourrait porter la contrainte électorale telle ou telle - parité, ancien étudiant de P8, etc. - et alors quel autre serait potentiellement irrecevable en telle place dans les compositions du Conseil fixées par la loi Fioraso. Il faut 5 coups d'avance pour éviter une des disqualifications possible ; il faut deux heures de reunion de liste préalable, et toute la pratique des collègues qui ont vécu la campagne sur le terrain, pour s'en rendre compte. 

Corps, parole, partis

La sensation de l'écrasement dans les corps. Je la ressens et nous la commentons, exclamons. Ahurissement, sidération, de voir la performance se faire, la majorité se construire, bloc, rangée. BL écrit qu'il y aura à apprendre à recevoir ça.

Gestes, coups (je parlerai sans doute avec beaucoup la métaphore des échecs, Saussure), le premier, de couper, interdire, l'ouverture d'un échange préliminaire au vote sur les enjeux des décisions imminentes. Premier speech act, la en-minoration encaisse.

Les parlants déglutissent, la parole est extrêmement tendue, certains (la majorité) lisent des textes préparés comme des rapports de comité de sélection, d'autres (la liste vouée à minoration) improvisent en cherchant à déséquilibrer rééquilibrer les accents. Une autre encore, de grande pratique et de grande individualité, parle et pose, puis même commente (un commentaire qui est la seule évocation du passé et du passif de ces conflits déjà profondément structurés) et est la seule à parler hors vernis, à couper jusqu'au delà de la fausse politesse et du miel. Hypocrisie, tiens, simplement.

Je m'étonne que les candidatures, toutes sollicitées et hautement stratégiques, soient évoquées uniquement, et derrière l'énoncé de 'discours 1' on pourrait presque dire (le bienséant), par camps. La contradiction est évidente pour tous et tous l'acceptent : les interventions sont des coups partisans, et les locuteurs tâtonnent dans le langage pour trouver des formulations euphémismes, l'air désintéressé et convaincu, déconflictualisées, pour dire ce qu'ils s'entendent bien dire : je soutiens ce candidat, j'indique que ce candidat est celui de telle liste.

dimanche 18 septembre 2016

Le conseil hors conseil

Phalanges, rangs serrés, troupes.
Indiquent que le conseil s'est tenu longuement en amont, dans des géographies dispersées qui ne sont pas celle de la table de conseil, préparations réunions listes groupages mots d'ordre.
Longs mois de campagne, allongés par les incidents électoraux qui ont retardé les processus constitutants. Et ont laissé le temps à beaucoup de développement des incidents, positionnements, interprétations, confrontations, circulation de textes et rétention/communication d'informations et de nouveaux coups dans le jeu plus ou moins annoncés ou secrets.

Cartes des groupes et des partis

Séance constituante : les groupes de liste arrivent groupés et se placent à l'immense table du conseil groupés, les visages assez tendus et les regards interrogateurs. Des sièges libres marquent les frontières entre groupes. Des collègues se saluent en camaraderie hors partisane, un coincée et mal à l'aise et chaleureuse à la fois. Un peu apologetic ?

Il va y avoir des pans d'écriture et d'observation, peut-être. J'en compte trois émergents : ethno, auto, et méthodo. Notes d'objectivation (mais je ne suis pas sûre de tenir ça, c'est ce qui est étranger et inconfortable pour mes tropismes disciplinaires) - qui pose la question de l'ethno-observation comme constitution de l'autre-observé et les contradictions situationelles d'y être aussi participant/e, note autobiographie, et note méthodologie de l'analyse. 

Ethnographie de la minorité

Transition depuis Ce que fait un angliciste :

Immédiatement, alors que je m'inquiétais sottement par avance de rencontrer surtout du flottant et de l'indétermination à longuement orienter, la vie en CA d'université donne ses traits, marque dans les subjectivités (les mines durcies) et dans les socialités (trombes de messages d'analyse ex post, très riches et utiles d'ailleurs), et indique tout aisément ce qui se donnera à étudier par une observation participatrice. Première réunion du nouveau CA de P8, constituante : élection, les yeux écarquillés, des membres extérieurs selon la structure imprimée (cf Kafka, la machine à tatouage) par la loi 
(Le comique étant la répétition systématique de ce schéma, une disposition de la gauche dans toutes ses situations ; disposition de la gauche, et de toute une série de caractères dans lesquels je suis glissée et qui me placent dans ces minorités encore et encore, ici et là et encore là. Minorité par discipline, entre autres. Il y a aussi des minorités de privilège, qu'il faut aussi intégrer à l'attention et qui racontent une autre histoire. La profession universitaire en est une à plusieurs valences.)
Ce sera donc, peut-être aussi facilement que ça, pour le projet de survivre par l'ethnographie aux 4 années de CA : par l'étude de la minorité.
Ce qui sera commode, en cela que pré-disposé aux outils d'analyse de la domination en sociologie, bourdieusienne la première. Ces outils seront à disposition et à disposition de la critique tout autant. Et le compagnonnage avec CS précieux et profondément instructif comme toujours.
Je pense qu'assez vite je peux poser une forme, comme quelque chose comme une branche du blog vers un Minority report.
Done.